Après de longues péripéties placées sous le signe des pertes financières et des dettes, le verdict est tombé : Air Madagascar disparaît pour renaître sous un nouveau nom et visage.
La compagnie, qui a déposé le bilan le 15 octobre 2021, va fusionner avec sa filiale Tsaradia – créée en 2018 pour assurer le transport de passagers et le fret de marchandises sur le réseau domestique – et devenir « Madagascar Airlines ».
Un secteur aérien à genoux
Alors que la réouverture du ciel malgache est prévue pour le 23 octobre, le nouveau pavillon s’organise pour maintenir certaines liaisons.
Le redémarrage rapide des activités a été rendu possible par la baisse des coûts de location des avions
Afin d’assurer les vols Tananarive-Paris – liaison internationale la plus populaire depuis l’île –, Madagascar Airlines va louer un Boeing 787 Dreamliner avec son équipage ainsi que son service de maintenance et d’assurance. L’avion sera opérationnel à partir du 6 novembre et desservira la capitale française deux fois par semaine. Selon des experts de l’aérien, un Airbus A340-300 en cours d’immatriculation assurera les vols vers la Chine. Un Embraer E 190 sera quant à lui affrété pour les vols régionaux.
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Le redémarrage rapide des activités a été rendu possible par la baisse des coûts de location des avions, conséquence indirecte de la crise sanitaire qui a mis à genoux le secteur aérien.
Un plan de redressement sur trois ans
Les dettes d’Air Madagascar s’élevant à 80 millions de dollars, le conseil des ministres malgache validé une « procédure collective d’apurement de passif » pour protéger le pavillon national de ses créanciers et entamer des négociations au sujet du remboursement des créances. Selon le communiqué officiel, les créanciers ont deux mois pour se manifester. Pour l’instant, les majorations et intérêts ont été suspendus.
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En parallèle, un plan de départs volontaires a été mis en place et des licenciements économiques sont prévus, conformément à un plan de redressement qui s’étendra sur trois ans. Le gouvernement malgache s’est engagé à injecter 3,5 millions de dollars dans la compagnie aérienne pour lui permettre de poursuivre, dans la mesure du possible, ses activités.
Le litige de longue date entre Air France et Air Madagascar au sujet de la vente-location de deux Airbus (5R-EAA et A340) serait « en cours de résolution », selon une source proche du dossier. Si tel n’était pas le cas, le pavillon malgache n’aurait pas lancé la procédure de réimmatriculation du A-340, avion prévu pour les vols vers la Chine et objet du conflit entre les deux compagnies, fait remarquer cette même source.
Juxtaposition de décisions économiques inappropriées
Selon les déclarations officielles du gouvernement malgache, « la majorité des dettes date de la cogestion de la compagnie avec Air Austral », notamment à cause d’une mauvaise gestion des ressources, comme l’illustre « la location d’avions ATR à un prix exorbitant – le double du prix normal – auprès d’Air Austral ».
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Des propos contredits par les déclarations officielles de cette dernière, qui estime avoir quitté la compagnie malgache en la laissant « réorganisée, avec un produit modernisé et des capacités de vol rétablies ».
Il n’y a pas eu de rigueur en matière de gestion financière
Pour rappel, les deux transporteurs ont signé le 21 juillet 2020 un protocole d’accord entérinant la fin définitive de leur partenariat stratégique, qui n’aura duré que deux ans.
Dans les faits, comme le démontrent les résultats de l’audit réalisé par le cabinet Bearing Point, il n’y a pas un seul « coupable » mais une juxtaposition de décisions économiques inappropriées et de corruption disséminée.
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Les autorités malgaches le reconnaissent : « Il n’y a pas eu de rigueur en matière de gestion financière. Les charges fixes n’ont d’ailleurs cessé d’augmenter à cause, entre autres, du nombre excessif de salariés. »
Des audits doivent être prochainement réalisés par des commissaires aux comptes afin d’analyser les dettes. Le porte-parole de l’État malgache a indiqué que « tout contrat qui aurait causé la faillite de cette compagnie aérienne nationale » sera suspendu, tout en promettant qu’à l’issue de la restructuration le pavillon national retrouvera « l’excellence dans ses opérations, avec fiabilité, régularité et ponctualité au niveau de ses offres ».