Les plateformes de streaming, stars d’un renouvellement de la consommation de films et de séries, semblent traverser une première crise dans leur jeune histoire. Cette crise est perceptible chez les nouveaux géants du web, comme Disney + et Salto. Disney +, lancé fin 2019 sur le continent américain, a par exemple perdu 2,4 millions d’abonnés pendant les trois derniers mois de l’année 2022, provoquant la suppression prochaine d’environ 7 000 emplois au sein du géant du divertissement. Chez nous, la plateforme Salto, qui devait se positionner comme le « Netflix français » et faisait la fierté des principaux groupes audiovisuels du pays, a annoncé sa fermeture. Le service a officiellement pris fin ce lundi 27 mars 2023, faute d’une rentabilité suffisante pour ses actionnaires.
Que conclure de ces différents revirements stratégiques ? D’abord que la multiplication des différentes plateformes forcent la plupart des utilisateurs à privilégier certaines offres, ce qui crée une concurrence acerbe entre les services et une course à l’exclusivité. Disney + mise tout sur un catalogue basé sur ses licences comme Pixar, Star Wars ou encore Marvel. Netflix mise elle sur des créations mettant en avant des stars planétaires, comme Tim Burton pour la série Mercredi ou Daniel Craig à l’affiche de Glass Onion, la superproduction proposée en décembre 2022. Il en va de même pour Prime, la plateforme vidéo d’Amazon, qui a récemment lancé ses adaptations en série des licences Le Seigneur des anneaux et The Last of Us, enregistrant deux succès mondiaux. Mais cette course folle a un prix.
Dans le détail, si Netflix se targue d’une bonne santé économique ces derniers mois, le vétéran des plateformes a vu son bénéfice net annuel baisser de 12%, à 4,5 milliards fin 2022. Et depuis son lancement, le service a accumulé plus de 14 milliards de dollars de dettes, notamment pour financer ses productions originales. Pour compenser les pertes et rester attractives, toutes les plateformes en sont venues au même constat: il leur faut augmenter le prix des abonnements. C’est donc comme cela que l’abonnement « standard » proposé par Netflix est passé de 7,99 à 13,49 euros par mois. Disney + et Amazon Prime ont eux augmenté leur prix de près de 40%.
Pour ne pas faire fuir certains utilisateurs, mais aussi en attirer d’autres, Netflix a ouvert la voie à une méthode qui était proscrite jusqu’ici : la page publicitaire en amont et pendant les programmes. La plateforme propose depuis le début de l’année une formule « essentiel » à presque six euros par mois comprenant de la publicité. Canal +, quant à lui, profite de la confusion autour du nombre de plateformes et a lancé une offre ironiquement appelée « Rat + », destinée aux moins de 26 ans. Celle-ci propose un regroupement d’abonnements aux différentes plateformes pour moins de vingt euros par mois, un compromis évitant aux utilisateurs de choisir une seule plateforme.
Si le secteur a montré ces premières fébrilités, il est encore loin de disparaître. Pour rappel, en 2022, Netflix à elle seule représentait près de 15% du trafic internet mondial, talonnant YouTube et Tik Tok.