La hausse de sa consommation et des tensions sur sa chaîne de production rendent difficile l’approvisionnement en paracétamol des officines. Les formes pédiatriques du médicament sont particulièrement touchées.
Les difficultés d’approvisionnement de paracétamol se prolongent cet automne. Alors qu’une première alerte avait été lancée, en juillet, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) renouvelle ses recommandations sur l’usage de l’antalgique.
Aux côtés du collège de la médecine générale (CMG) et des syndicats de pharmaciens (FSPF et USPO), l’agence appelle les professionnels à modérer les prescriptions pour les patients qui n’ont pas d’utilité immédiate pour « permettre ainsi aux patients qui ont un besoin immédiat de pouvoir en bénéficier ».
Mais ce phénomène ne date pas d’hier. « Cela fait des mois et des mois qu’il y a des problématiques de tensions sur le paracétamol », rappelle Philippe Besset, le président de la Fédération des Syndicats Pharmaceutiques de France (FSPF). « On n’arrive pas à être livré sur l’ensemble des produits », explique-t-il.
Pour éviter une pénurie au niveau national, un contingentement quantitatif avait été mis en place depuis juillet dernier. L’objectif est de limiter les livraisons en pharmacie afin d’éviter des pénuries localisées et garantir une homogénéité de l’offre sur le territoire. « La vente est aussi limitée à deux boîtes par patient », rappelle le patron de la FSPF.
Les formes pédiatriques les plus touchées
Avec l’aggravation récente de ces tensions d’approvisionnement, les pharmacies d’officine ont appelé l’ANSM à communiquer auprès du grand public.
« Cela nous aide à expliquer aux patients qu’il y a ces limitations », indique-t-il, avant de justifier: « car même s’il est en libre accès, le paracétamol n’est pas un produit de consommation courante ».
Alors qu’elles concernaient d’abord le leader du marché, Doliprane, fabriqué par Sanofi, ces tensions s’observent à présent de manière indifférenciée sur l’ensemble des médicaments à base de paracétamol, y compris ceux du laboratoire UPSA (Efferalgan et Dafalgan).
En particulier, le président de la FSPF alerte sur le manque de médicaments destinés aux enfants. Car contrairement à ceux destinés adultes pour lesquels les pharmaciens peuvent proposer des alternatives (d’autres marques ou d’autres formes), « pour les enfants, il n’y a que les suppositoires », insiste-t-il. « Pour les bébés, il existe aussi du paracétamol en sirop mais il n’est pas forcément adapté, notamment en cas de vomissements », explique le président de FSPF.
Pas question toutefois de parler de pénurie. « La production et les livraisons en paracétamol ont été ajustées pour permettre un approvisionnement sûr et continu sur l’ensemble du territoire », peut-on lire dans le communiqué. « Toutes les équipes de nos sites de production de Lisieux et de Compiègne ainsi que de nos sites de distribution sont mobilisées pour répondre au mieux aux besoins des patients », nous a aussi assuré Sanofi.
La hausse de la consommation en cause
A l’origine de ces tensions d’approvisionnement, on retrouve la hausse significative de la consommation de paracétamol observée ces dernières années. Une tendance qui s’explique par l’augmentation des épisodes infectieux et par l’apparition du Covid, un virus dont on ne peut traiter que les symptômes. Or le paracétamol est la substance indiquée pour atténuer les courbatures et faire chuter la fièvre.
Si les fabricants ont eu deux ans de crise sanitaire pour s’adapter à cette demande supplémentaire, d’autres facteurs renforceraient aujourd’hui ces difficultés. Des tensions sur les matières premières, comme l’aluminium utilisé pour les emballages des comprimés, et la production de certains excipients semblent affecter les livraisons.
Face à ces tensions, le projet de relocalisation de la production de paracétamol annoncée en juin 2020 par Emmanuel Macron, apparaît donc comme une manière de sécuriser son approvisionnement. Car si le principe actif est bien conditionné en France dans les usines de Sanofi et d’UPSA, le reste de sa chaîne de production est délocalisée en Asie et en Amérique du nord. En 2023, une usine du sous-traitant pharmaceutique Seqens, implantée à Roussillon (Isère), devrait produire du paracétamol Made in France.