Le gouvernement philippin a identifié quatre nouvelles bases militaires que les États-Unis vont pouvoir utiliser dans le pays, dans le cadre d’un accord de défense élargi destiné à faire face à la Chine. Les quatre bases incluent trois sur l’île principale de Luçon, près de Taïwan, et une dans la province de Palawan dans la mer de Chine méridionale (SCS). Cette extension des options de sécurité américaines dans la région Indo-Pacifique intervient suite à une escalade des préoccupations concernant l’attitude territoriale agressive de la Chine dans toute la région. Les nouvelles bases, ouvertes dans le cadre de l’accord de coopération renforcée en matière de défense (EDCA) de 2014, permettront aux États-Unis de faire tourner ses troupes dans un total de neuf bases aux Philippines, y compris sur l’île stratégiquement importante de Balabac, proche des installations chinoises en mer de Chine méridionale.
Ces nouvelles bases renforceront l’interopérabilité des forces armées américaines et philippines et leur permettront de répondre plus facilement ensemble à une série de défis communs dans la région Indo-Pacifique, y compris les catastrophes naturelles et humanitaires, a déclaré Sabrina Singh, porte-parole adjointe du Pentagone, lors d’une conférence de presse lundi. L’annonce de l’emplacement des nouvelles bases fait suite à une série d’accords militaires de haut niveau conclus par les États-Unis dans la région, notamment des plans pour partager des technologies de défense avec l’Inde et déployer de nouvelles unités de marines américains sur des îles japonaises. Plus tôt cette année, le Corps des Marines américains a ouvert une nouvelle base à Guam, une île stratégiquement importante à l’est des Philippines. L’emplacement, connu sous le nom de Camp Blaz, est la première nouvelle base de Marines en 70 ans et pourrait éventuellement accueillir 5 000 Marines.
Les quatre nouvelles bases sont Balabac Island dans la province de Palawan, la base navale Camilo Osias à Santa Ana, province de Cagayan, l’aéroport de Lal-lo à Cagayan et le camp Melchor dela Cruz à Gamu, Isabela. Le secrétaire philippin à la Défense, Carlito Galvez Jr., a déclaré que les quatre bases étaient « très stratégiques », en particulier la base navale de Cagayan et celle de Balabac Island. Le site Camilo Osias est situé à seulement 500 kilomètres (310 miles) de Kaohsiung, troisième plus grande ville de Taïwan avec une population de 2,7 millions de personnes. Galvez a déclaré que Balabac se trouve sur des lignes de communication stratégiques en mer de Chine méridionale, où Manille et Pékin ont des revendications territoriales concurrentes, y compris sur des îles où Pékin a construit des fortifications militaires.
Collin Koh, chercheur à l’école d’études internationales S. Rajaratnam à Singapour, a déclaré que les bases joueraient un rôle en cas de conflit potentiel dans la région. « Les sites du nord ne sont pas seulement destinés à une éventuelle contingence avec Taïwan, ils ont une utilité en cas de conflit en mer de Chine méridionale », a déclaré Koh. « Il est difficile d’imaginer qu’un conflit dans le détroit de Taïwan n’inclura pas une dimension en mer de Chine méridionale. » Koh a identifié le détroit de Bashi, dans la partie nord du détroit de Luçon, plus proche de Taïwan, comme un point de passage critique, soit pour les forces navales chinoises afin de s’échapper de leurs eaux territoriales et atteindre l’océan Pacifique pour cibler les installations militaires américaines sur Guam à l’est, soit pour les navires de guerre américains pour entrer dans la mer de Chine méridionale.
Il a également souligné la proximité de Balabac de l’atoll disputé du récif Mischief, où la Chine a construit une île artificielle avec des installations militaires. « Le site de Balabac permet la collecte de renseignements et la mise en place d’activités aériennes et navales en temps de paix dans la région, ce qui peut mettre le récif Mischief sous surveillance plus étroite », a déclaré Koh. Le Parti communiste chinois revendique la quasi-totalité de la mer de Chine méridionale comme sa propriété souveraine, tout comme Taiwan, une démocratie insulaire de 23,5 millions d’habitants qu’il n’a jamais contrôlée. Les responsables philippins et américains ont tous deux souligné que les quatre nouvelles bases ne verraient pas de présence militaire permanente des États-Unis, ce qui n’est pas autorisé par l’EDCA, mais seront disponibles pour les forces américaines en cas de contingence.
« Cela concerne vraiment la préparation régionale », a déclaré Singh lors de la conférence de presse lundi. « Vous allez voir une augmentation des forces de rotation dans la région », a-t-elle ajouté, précisant que le département de la Défense travaillerait en étroite collaboration avec ses partenaires philippins pour moderniser rapidement les bases. Cette annonce intervient alors que les forces américaines et philippines se préparent à mener leurs plus grandes manœuvres militaires conjointes plus tard ce mois-ci, lors des exercices Balikatan 23, auxquels devraient participer environ 17 600 soldats des deux pays. Washington et Manille sont liés par un traité de défense mutuelle signé en 1951 qui reste en vigueur, ce qui en fait la plus ancienne alliance bilatérale de traité dans la région pour les États-Unis.
