Maurine Mercier, journaliste de la RTS en poste en Ukraine, a remporté samedi le Prix Bayeux des correspondants de guerre dans la catégorie radio. Elle est récompensée pour ses reportages forts sur les exactions commises par les forces russes à Boutcha. Il s’agit d’une première pour une journaliste suisse.
Maurine Mercier raconte son reportage à Boutcha, dans lequel elle a pu tendre son micro à une femme et à sa fille, violées pendant deux semaines par des soldats russes. « Cette femme m’a dit ‘Je n’ai la force de témoigner qu’une fois. Faites en sorte que le monde sache.' »
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Et la journaliste de poursuivre: « Ce prix Bayeux, tellement important, je le dédie à cette femme qui a trouvé le courage inouï de témoigner de ces deux semaines et demie de viols constants par les soldats russes. J’ai passé des jours à Boutcha jusqu’à pouvoir recueillir son témoignage. Plusieurs femmes rencontrées sur place m’ont témoigné de viols sans parvenir à trouver le courage d’en parler ».
Cette femme et sa fille de 13 ans m’ont raconté pendant trois heures ce qu’elles avaient subi
« La radio m’a permis de travailler sur la durée », confie Maurine Mercier. « De revenir tous les jours à Boutcha, des jours durant. La guerre, ce sont les combats, les bombes, mais ce sont aussi ces violences, terribles, silencieuses, subies par les femmes et les enfants. Je suis infiniment reconnaissante au prix Bayeux de mettre en lumière ces souffrances. »
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Un devoir, mettre en lumière la guerre et ses conséquences
Maurine Mercier souhaite aussi dire toute sa reconnaissance à sa fixeuse à Boutcha, Annabel: « Nous ne pouvons nous journalistes travailler que grâce à nos fixeurs, essentiels. »
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« Notre devoir est de mettre en lumière, sur la longueur, la guerre et ses conséquences », poursuit la correspondante de la RTS. « Une immense pensée à mes collègues aussi qui ont été tués, notamment en Ukraine. Immense pensée à Frédéric Leclerc-Imhoff tué en Ukraine comme bien trop de journalistes. »
Et Maurine Mercier continue à penser à sa famille: « Immense pensée à sa famille, à son collègue Maxime Brandstaetter et leur fixeuse Oksana qui ont survécu à ce bombardement. Frédéric et Maxime, ce sont deux collègues devenus amis et qui m’ont entourée après mon travail à Boutcha. Je leur dédie à eux aussi ce prix. C’est toute la solidarité et la fraternité entre nous journalistes qui tentons de couvrir ces conflits. »
Le Prix Bayeux, créé en 1994, vise à rendre hommage aux journalistes qui exercent leur métier dans des conditions périlleuses pour permettre d’accéder à une information libre.
>> Réécouter le reportage de Maurine Mercier à Boutcha (version complète):
Propos recueillis par Nadine Haltiner/ebz