LA CONTRÔLEURE DES LIEUX DE PRIVATION DE LIBERTÉ DÉNONCE LES GARDÉES À VUE « PRÉVENTIVES » LORS DES MANIFESTATIONS
Le mercredi 3 mai 2023, Dominique Simonnot, la contrôleure générale des lieux de privation de liberté, adresse une lettre au ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, où elle dénonce « des atteintes graves aux droits fondamentaux » de personnes interpellées lors des manifestations contre la réforme des retraites à Paris. La contrôleure pointe du doigt la gestion des gardes à vue, qu’elle juge « préventives », par le respect des textes de droit français. Dans sa réponse, le ministre de l’Intérieur conteste ces accusations.
RECOURS MASSIF À LA PRIVATION DE LIBERTÉ
Dans un courrier rendu public le même jour, Dominique Simonnot précise avoir mené des vérifications dans neuf commissariats parisiens les 24 et 25 mars 2023. Elle constate que « les instructions données par la préfecture de police et le parquet de Paris (…), de même que le taux de classement sans suite des procédures, révèlent un recours massif, à titre préventif, à la privation de liberté à des fins de maintien de l’ordre public ». Elle considère cette approche « préventive » illégale et responsable d’atteintes aux droits des personnes concernées.
Dans sa réponse écrite datée du 2 mai 2023, Gérald Darmanin rejette ces accusations. Il estime que la recherche de preuves pour établir la responsabilité individuelle lors des manifestations violentes est souvent entravée. Il soutient que l’absence d’infraction initiale n’est pas avérée.
CARENCES ALARMANTES CONCERNANT LES DOCUMENTS DE PROCÉDURE
Dominique Simonnot rapporte également des irrégularités dans les documents relatifs à l’interpellation et l’indigence des éléments permettant de caractériser l’infraction ou la tentative d’infraction en cause. Elle note que les documents de procédure ont été affectés par des carences qui sont « particulièrement alarmantes ». Elle ajoute que « 80 % des procédures sont classées sans suite une fois opéré le contrôle de l’autorité judiciaire, la minorité des personnes déférées (…) quitte le tribunal libre ».
UNE APPROCHE DU MAINTIEN DE L’ORDRE « DÉVOYÉE »
Pour la contrôleure des lieux de privation de liberté, cette méthode de maintien de l’ordre révèle non seulement une instrumentalisation des mesures de gardes à vue à des fins répressives, mais également « un dévoiement du rôle de l’autorité judiciaire dont le rôle (…) n’est pas de garantir la sécurité juridique des mesures de police, a fortiori lorsqu’elles sont sciemment prises en méconnaissance de la loi ».
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Dès le début de la contestation de la réforme des retraites, différents acteurs ont eu des avis partagés sur les interpellations avant les manifestations. Claire Hédon, la Défenseure des droits, s’était inquiétée de ces arrestations le 21 mars 2023. Malgré les dénégations du préfet de police de Paris, Laurent Nuñez, la contrôleure générale a pointé du doigt les pratiques préventives visant la privation de liberté. Elle appelle à une meilleure réglementation de cette pratique pour éviter les atteintes aux droits fondamentaux.
Lien vers la lettre de la CGLPL et le rapport : https://www.cglpl.fr/wp-content/uploads/2023/05/Enquête-GAV-manifestation_lettre-ministre-de-lintérieur-et-rapport.pdf
Lien vers les observations du ministère de l’Intérieur : https://www.cglpl.fr/wp-content/uploads/2023/05/Observations-du-ministre-de-lintérieur_Enquête-sur-les-gardes-à-vue-manifestations.pdf