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En Ethiopie, l’addiction aux paris sportifs gagne toutes les couches de la société

En Ethiopie, l’addiction aux paris sportifs gagne toutes les couches de la société


LETTRE D’ADDIS-ABEBA

Dans une rue d’Addis-Abeba, le 11 septembre 2022.

La folie des paris sportifs défraye la chronique en Ethiopie. Passés au stade de véritable addiction chez de nombreux jeunes Ethiopiens, ceux-ci se trouvent désormais dans le viseur des autorités, qui menacent tout simplement de les interdire. Fin juin, le responsable de la jeunesse au ministère des affaires sociales, Abebe Haimanot, lançait un avertissement aux opérateurs lors d’une interview à la télévision nationale. Les jeux d’argent provoqueraient « une crise sociale » qui « décourage les jeunes de travailler et d’être maîtres de leurs vies », et « entraîne des dépressions et des pensées suicidaires ». Le ministère souhaiterait donc y mettre un terme, sans préciser à quelle échéance.

La tâche s’annonce ardue. Le gouvernement devra faire face à la pression des lobbies de jeux d’argent mais aussi à celle de la population, alors que la pratique des paris sportifs s’est profondément ancrée dans les mœurs et le paysage éthiopien en un peu moins d’une décennie. Partout en ville, dans la capitale Addis-Abeba ou en province, les boutiques bourgeonnent à chaque coin de rue. Il y en a plus de 2 000 à travers l’Ethiopie.

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Il suffit d’effectuer quelques pas à Piassa, le quartier historique de la capitale, pour tomber sur des dizaines de petits comptoirs appartenant à l’un des 44 opérateurs sous licence dans le pays. Dans le local exigu du Vamos Betting, les quatre ordinateurs sont continuellement pris d’assaut. Les joueurs, tous jeunes, patientent dans le vestibule jusqu’à ce qu’une place se libère. Il n’est pas rare d’y croiser des policiers en service, ou encore des lycéens et des étudiants, malgré l’interdiction légale de jouer avant 21 ans.

« Les étudiants délaissent leurs études »

Mintesinote, 29 ans, décortique les huit tickets qu’il a en main. « C’est spécial aujourd’hui car c’est soir de Ligue des champions », plaisante-t-il. Pour la peine, il a parié 400 birr (7,50 euros) sur une trentaine de rencontres ; une somme colossale pour cet ouvrier en bâtiment. S’il a exceptionnellement remporté la mise de 9 000 birr au mois d’août, il « perd généralement plus d’argent [qu’il] n’en gagne ».

« Quand tu gagnes une fois, c’est grisant, tu penses que tu es le meilleur, tu en rêves la nuit, tu réinvestis et tu perds tout. » Mintesinote

D’ailleurs, il confesse avoir dilapidé l’ensemble de son gain en pariant tous les jours depuis un mois. « Quand tu gagnes une fois, c’est grisant, tu penses que tu es le meilleur, tu en rêves la nuit, tu réinvestis et tu perds tout », avoue-t-il, furieux à l’idée que le gouvernement puisse interdire ce qui est devenu son passe-temps favori.

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